Crète
La Crète, en grec : Κρήτη, ancien Krḗtē, moderne Kríti) est une île grecque, autrefois appelée île de Candie.
Cinquième plus grande île de la mer Méditerranée, elle est rattachée à la Grèce en 1913 dont elle est une des treize périphéries (région administrative).
La Crète est le berceau de la civilisation minoenne, dont Cnossos est le cœur et le site archéologique le plus important.
Paysage de Crète intérieure dans les environs d'Anogia GéographieCarte topographique de la Crète La Crète vue de l'espaceLa Crète possède une forme étirée : elle s'étend sur 260 km d'est en ouest et sur 60 km du nord au sud.
D'une superficie de 8 400 km², et d'une périphérie d'environ 1 000 km, elle est la cinquième île de Méditerranée après la Sicile, la Sardaigne, Chypre et la Corse.
Tout comme la Corse, elle est montagneuse ; trois massifs montagneux dominent l'île : les Lefká Óri (2 453 m) ou Montagnes Blanches à l'ouest, le massif du Mont Psiloritis (2 456 m) ou mont Ida au centre (le point culminant de l'île) et le massif du Mont Dikti (2 148 m) à l'est.
À l'ouest de l'île se trouvent des gorges, les gorges de Samaria.
Les massifs calcaires sont karstifiés et abritent des cavités remarquables par leurs dimensions, telles que Mavro Skiadi,...
La Crète marque l'un des extrema géographiques de l'Europe : le cap Tripiti sur l'île de Gavdos est le point le plus au sud de l'Europe géographique.
La Crète compte officiellement environ 35 millions d’oliviers.
Riche d'un écosystème très diversifié, elle abrite plusieurs espèces d'animaux qu'on ne retrouve nulle part ailleurs, ainsi qu'une flore très variée.
L'île est bercée par un climat méditerranéen : l'été est chaud et sec, alors que l'hiver est plutôt doux.
La Crète souffre en revanche de problèmes d'environnement.
Il y a quelques années encore, une immense décharge à ciel ouvert située près de La Canée posait d'importants problèmes écologiques.
L'État grec a donc décidé de la fermer, mais il existe encore beaucoup de décharges sauvages un peu partout sur l'île.
Les plages sont, elles aussi, envahies de déchets en tout genre (bien que certaines d'entre elles soient régulièrement nettoyées, comme Elafonissi).
Les rivages crétois sont malheureusement victimes également de dégazages.
HistoireArticle détaillé : Histoire de la Crète.L'île aurait connu une première vague de peuplement, il y a près de 130 000 ans, par voie maritime.
À partir de 7000 av. J.-C. (époque néolithique), la Crète est envahie par des peuples venant d'Anatolie qui pratiquent l'agriculture et l'élevage.
Les plus anciennes poteries sont trouvées à Cnossos et Phaistos.
Culte de la « Grande Mère », déesse de la fertilité.
Période prépalatiale : 2600-2100 av. J.-C.
De nouveaux immigrants viennent de l'Est.
Les poteries sont plus fines, le travail du cuivre et du bronze se généralise.
Période paléopalatiale : 2100-1650 av. J.-C. La Crète atteint une position prééminente en mer Méditerranée.
Elle introduit l'écriture phonétique en Europe à travers deux systèmes contemporains : les hiéroglyphes crétois d'une part, le linéaire A d'autre part, un millénaire environ avant l'alphabet grec.
Période néopalatiale : 1700-1450 av. J.-C. Destruction des palais vers -1700 suivie d'une reconstruction, apogée du système palatial.
Période postpalatiale : 1450-1200 av. J.-C. La culture minoenne décline rapidement. Chute de Cnossos.
Les Mycéniens envahissent la Crète.
1200-67 av. J.-C. : La Crète vit selon l'organisation sociale dorienne, intégrée à la culture grecque classique.
67 av. J.-C.-395 : La Crète appartient à l'Empire Romain. Gortyne devient capitale de la Crète et de la province qui comprend la Cyrénaïque.
Un des premiers timbres de Crète autonome, 1900395-824 : La Crète fait partie de l'empire romain d'orient, dit byzantin.
824-961 : La Crète appartient aux Abbassides, dynastie arabo-musulmane.
961-1204 : Reconquête par les Byzantins.
1204-1669 : Après la prise de Constantinople par les croisés, Candie (la Crète) devient vénitienne.
1669 : La Crète est conquise par les Ottomans qui, comme à Chypre, y installent des populations musulmanes.
1822-1868 : La Crète est rattachée à l'Égypte.
1866-1868 : Révolte des Crétois contre l'Empire ottoman, réprimée dans le sang.
1897-1898 : Nouvelle révolte débouchant sur un statut d'autonomie sous tutelle internationale.
1913 : La Crète est rattachée à la Grèce.
1922-1923 : Dans le cadre du Traité de Lausanne échange des 25 000 musulmans de Crète contre 50 000 orthodoxes de Cilicie.
1941 : bataille de Crète, invasion allemande de l'île alors défendue par les troupes britanniques et les restes des troupes grecques libres.
1941-1944 : La résistance crétoise, ravitaillée par les Britanniques, bloque toute une division allemande dans l'île. L'été 1944, elle libère les trois quarts du pays : les Allemands se réfugient dans l'ouest, autour de La Canée, où ils se retranchent jusqu'en mai 1945, mais souffrent de la faim.
Depuis 1950 : La Crète devient une destination touristique européenne.
Principales villesChóra Sfakíon SpiliAgios Nikolaos (Άγιος Νικόλαος)
La Canée (souvent transcrit en Chania ou Hania) (Χανιά) (ancienne capitale de la Crète de 1898 à 1971)
Héraklion (Ηράκλειο) (capitale de la Crète depuis l'époque byzantine juqu'à 1898, elle est redevenue la capitale de l'île en 1971)
Ierapetra (Ιεράπετρα)
Kofina
Paleóchora
Paleokastro
Réthymnon (Ρέθυμνο)
Chóra Sfakíon
Spili (Σπήλι)
Moires (Μοίρες)
Tympaki (Τυμπάκι)
Sitía (Σητεία)
Chersónissos
Matala
Malia
Mochlos
ReligionLa Crète a été évangélisée dès les premiers temps du christianisme.
Son apôtre aurait été Tite, disciple de Saint Paul, auquel ce dernier a écrit une épître.
La religion dominante est le christianisme orthodoxe. L'Église crétoise est indépendante de l'Église grecque, et relève directement du patriarcat œcuménique de Constantinople.
Elle a été un des éléments les plus importants de la résistance à l'occupant turc.
Les populations musulmanes installées en Crète après la conquête de l'île par l'Empire Ottoman, ou converties sur place, et qui regroupaient près de 30% de la population au recensement de 1881 ont commencé à partir dans les années 1890, avant que les derniers soient expulsés lors des échanges de populations entre la Grèce et la Turquie en 1924, après le traité de Lausanne de 1923.
La Crète a alors accueilli de nombreux réfugiés grecs d'Asie Mineure, de religion orthodoxe, expulsés de Turquie.
Mythes fondateursL'île de Crète a été le théâtre de nombreux épisodes de la mythologie grecque :
Elle est le lieu où Zeus est né, protégé par sa mère Rhéa, contre l'appétit de son père Cronos.
Zeus serait né dans une caverne du mont Dicté (ou du mont Ida selon les auteurs).
Il y aurait été élevé par des nymphes et des Curètes.
Elle est le lieu des amours de Zeus (changé en taureau) et de sa captive Europe, liaison qui donnera naissance à Minos, le roi légendaire de la Crète.
L'épouse de Minos, Pasiphaé, ayant succombé au charme d'un taureau envoyé par Poséidon, elle enfanta le fameux Minotaure.
Celui-ci fut enfermé par Minos dans le Labyrinthe, construit par l'architecte Dédale.
L'emplacement du Labyrinthe, situé par les auteurs de l'antiquité à Knossos, serait reconnaissable d'après certains archéologues sur le site du palais minoen retrouvé sur ce site ; il a toutefois pu être situé par certains auteurs en d'autres endroits comme la carrière appelée Labyrinthe située près de Gortyne.
La ruse et le courage de Thésée et d'Ariane permirent de tuer le Minotaure et de ressortir du Labyrinthe.
Enfin, Dédale et son fils Icare cherchent à s'échapper de l'île où la vengeance de Minos les poursuit : pour cela, Dédale construit des ailes en cire.
Icare y laissa la vie en volant trop près du soleil.
ÉconomieGorge d'Aradaina Plage de BalosLa Crète est depuis le XIXe siècle au moins, sinon depuis l'Antiquité, l'une des régions de Grèce qui produisent le plus d'huile d'olive.
L'olivier occupe une grande partie des plaines, collines et pentes des montagnes crétoises.
Un début de recherche de la qualité s'observe avec des huiles d'olive d'origine contrôlée à la mode française, notamment à Zakros (est).
L'élevage ovin et caprin est en déclin, même si l'agrimi, krikri ou chèvre sauvage fait toujours partie du paysage.
Les plantations agricoles (tomates, primeurs) bénéficient d'un ensoleillement exceptionnel mais restent limitées (secteur de Moires, dans la Messara).
La ressource croissante de la Crète est son énorme potentiel touristique, associant mer, soleil, montagne, culture, sites archéologiques ; comme en Espagne, il devrait conduire vers un tourisme de plus en plus éclectique et amoureux de l'environnement et de la culture crétoise, les sites bétonnés de la côte nord devenant d'un rapport qualité-prix discutable par comparaison avec les sites espagnols, italiens, français et croates.
À l'inverse, la côte sud est beaucoup plus traditionnelle, liant vieux monastères, villages hauts-perchés des montagnes et criques sablonneuses accessibles seulement à pied.
Les ressources invisibles ne sont pas évaluées (transferts de ressources de Grèce continentale vers la Crète et notamment revenus tirés de la marine marchande), mais la diaspora crétoise, installée en Australie et sur la côte est des États-Unis, est active, ingénieuse, de haut niveau et solidaire.
Spécialités culinaireLa rakí ou tsikoudiá est un alcool de marc de raisin.
Le meilleur (et le plus fort) est fabriqué en montagne mais le principal, réservé à la consommation de masse, est produit plus bas.
Minotaure
Minotaure, copie d'une statue de Myron, Musée national archéologique d'Athènes.Le Minotaure est, dans la mythologie grecque, un monstre fabuleux possédant le corps d'un homme et la tête d'un taureau ou mi-homme et mi-taureau.
Né des amours de Pasiphaé et d'un taureau blanc envoyé par Poséidon, il fut enfermé par le roi Minos dans le labyrinthe, situé au centre de la Crète, qui fut construit spécialement par Dédale afin qu'il ne puisse s'en échapper et que nul ne découvre son existence.
Dans les textes anciens, le minotaure porte aussi le nom d’Astérios, ou Astérion, du nom du roi de Crète à qui Zeus avait confié Minos, fruit de son union avec Europe.
Le Minotaure a finalement été tué par Thésée, le fils d'Égée, avec l'aide d'Ariane.
Le minotaure est une figure très connue du bestiaire thérianthropique grec, qui a été reprise dans de très nombreuses œuvres, à la fois dans l'art, la littérature, le cinéma, le jeu de rôle et le jeu vidéo.
ÉtymologieLe mot « Minotaure » est issu du grec ancien Μινώταυρος / Minốtauros, qui signifie « le taureau de Minos ».
Ce mot est formé étymologiquement de Μίνως (Minos) et du substantif ταύρος (Tauros, soit « taureau »).
Le taureau était connu en Crète sous le nom d'« Astérion », un nom qu'il partage avec Astérion, le père nourricier de Minos.
MytheLe mythe du minotaure est rapporté par les auteurs greco-romains : Apollodore et Hygin détaillent la conception du monstre et sa mort.
Virgile et Ovide évoquent le mythe brièvement.
NaissanceLe palais de Cnossos, qui pourrait être à l'origine du mythe du labyrinthe selon certains archéologuesPasiphaé et le Minotaure, kylix attique à figures rouges, 340-320 av. J.-C., Cabinet des médailles de la Bibliothèque nationale de FranceLe pseudo-Apollodore raconte dans sa Bibliothèque la conception du monstre :
Le roi de Crète Astérion étant mort sans enfants, on refusa à Minos le royaume auquel il prétendait.
Il fit donc croire qu'il avait reçu la royauté des dieux, et pour le prouver, ajouta qu'il obtiendrait la réalisation de n'importe laquelle de ses prières.
Il implora Poséidon de lui offrir un superbe animal qu'il lui sacrifiera.
Alors qu'il priait, Poséidon fit surgir des profondeurs et sortir des flots un magnifique taureau blanc (le taureau crétois.
Minos obtint ainsi le trône, cependant, il trouvait l'animal si beau qu'il décida de tromper le souverain des mers en mettant le taureau dans son cheptel et en sacrifiant un autre.
Minos obtint assez rapidement le contrôle des mers autour de son île mais Poséidon, irrité qu'il n'ait pas honoré sa parole, rendit le taureau sauvage et fit naître en Pasiphaé, originaire d'Axos, la femme de Minos, une passion pour lui.
Devenue folle amoureuse du taureau, Pasiphaé trouva un complice en la personne de Dédale, un architecte qui avait été exilé d'Athènes pour meurtre.
Celui-ci construisit une vache de bois qu'il mit sur des roues, en creusa l'intérieur, puis il y ajouta la peau d'une vache qu'il venait de dépecer, et, l'ayant placée dans une prairie où le taureau avait coutume de paître, près de Gortyne, il y fit entrer Pasiphaé.
Le taureau arriva et s'accoupla avec elle comme si elle était une véritable vache.
Pasiphaé donna ainsi naissance à Astérios, ou Astérion, qu'on appelle le Minotaure : il avait la tête d'un taureau et le reste du corps d'un homme.
Suivant les conseils de ses oracles, Minos enferma ce monstre dans une prison construite tout exprès par Dédale, le Labyrinthe.
Avec son grouillement de méandres, il était impossible pour le Minotaure de trouver la sortie.
L'essence du mythe de la naissance du minotaure a été exprimée de manière très succincte dans les Héroïdes attribuées à Ovide, où la fille de Pasiphaé se plaint de la malédiction de l'amour non partagé de sa mère : « Le taureau est la forme déguisée d'un dieu, Pasiphaé, ma mère, victime de cette illusion, a enfanté dans la douleur ».
Certains hommes de lettres voient dans la naissance du Minotaure un simple mythe libidineux qui insiste sur le moyen mis en œuvre pour arriver à une copulation effective entre une femme et un taureau, mais selon d'autres interprétations, la version plus connue du mythe aurait peut-être été intentionnellement créée pour occulter l'aspect d'un mariage mystique avec un dieu sous forme de taureau : l'union de Pasiphaé avec le taureau aurait, selon R.F. Willets, été reconnue comme une union mystique durant au moins un siècle et F. B. Jevons note que pour le mythe d'Europe comme pour celui de Pasiphaë, le noyau est l'union de l'esprit de la lune (sous forme humaine), avec un taureau, et que les deux mythes évoquent un mariage sacré.
Le minotaure, tel que les anciens grecs l'imaginaient, avait le corps d'un homme avec la tête d'un taureau.
Pasiphaé s'en occupa alors qu'il était petit, mais il grandit vite et devint féroce.
Minos, après avoir demandé conseil à l'oracle de Delphes, ordonna à Dédale la construction du gigantesque labyrinthe pour l'enfermer.
Combat avec ThéséeThésée tuant le minotaure, par BaryeLe combat du minotaure avec Thésée est également détaillé par Apollodore :
Thésée affrontant le minotaure, d'après une sculpture de Jean-Étienne Ramey, marbre, 1826, exposée au jardin des Tuileries, à Paris.Tous les neuf ans (ou chaque année selon Virgile), sept jeunes gens et sept jeunes filles étaient envoyés en sacrifice en Crète, en expiation du meurtre d'Androgée, fils de Minos, par Égée, roi d'Athènes.
Une année, Thésée, le propre fils d'Égée, fut tiré au sort ou embarqua de son plein gré parmi les jeunes gens destinés au sacrifice.
En arrivant en Crète, Thésée rencontra Ariane, la fille de Minos, qui tomba amoureuse de lui.
Sachant ce qui l'attendait, elle lui donna une bobine de fil afin qu'il la déroule dans le labyrinthe et puisse retrouver son chemin s'il ressort vivant du combat.
Thésée trouva le Minotaure, le tua et retrouva son chemin dans le labyrinthe grâce à la bobine déroulée.
Autres mentions du mytheVirgile, dans l'Enéide, évoque rapidement le mythe :Texte latin original Traduction française « In foribus letum Androgeo; tum pendere poenas
Cecropidae iussi - miserum ! - septena quotannis
corpora natorum ; stat ductis sortibus urna.
Contra elata mari respondet Gnosia tellus :
hic crudelis amor tauri, suppostaque furto
Pasiphae, mixtumque genus prolesque biformis
Minotaurus inest, Veneris monumenta nefandae ;
hic labor ille domus et inextricabilis error ;»
— Virgile, Enéide, VI,
« Sur les portes figure la mort d'Androgée ; à l'époque, un châtiment
fut imposé aux Cécropides, qui, ô malheur !, sacrifiaient chaque année
sept de leurs fils ; l'urne est dressée pour le tirage au sort.
En face, la terre de Gnosse, qui émerge de la mer, y fait pendant :
ici une passion cruelle pour un taureau, la fourbe substitution
de Pasiphaé et, race mêlée, descendance difforme,
voilà le Minotaure, monument d'une Vénus monstrueuse,
enfin l'œuvre fameuse, le palais aux détours inextricables.»
— L'Énéide louvaniste
Hygin, dans ses Fables, reprend aussi les épisodes de la légende, la conception du minotaure par Pasiphae et sa mort de la main de Thésée.
Les Métamorphoses d'Ovide comprennent également un bref récit de ce mythe.
Point de vue étrusqueLe mythe du minotaure est vu d'un point de vue essentiellement athénien comme l'antagoniste de Thésée et les sources littéraires sont biaisés puisqu'elles sont toutes en faveur des perspectives d'Athènes.
Les Étrusques ont une version différente du mythe puisqu'ils font d'Ariane l'épouse de Dionysos Thésée, lui se contente d'épouser Phèdre, sa sœur, et de déposer Ariadne sur l'île de Dia, soit de son propre chef, soit avec son assentiment...
Le point de vue étrusque offre une alternative au mythe du Minotaure, jamais vue dans l'art grec : sur une tasse de vin à figures datée du début du IVe siècle av. J.-C., Pasiphaé enserre tendrement le minotaure enfant sur ses genoux.
Symbolique et origineFigurine représentant un homme à cornes de taureaux, retrouvée à Enkomi, en ChypreSelon Jorge Luis Borges, la figure du minotaure est née du culte du taureau et de la double hache (labrys, qui a donné le mot labyrinthe) qui était fréquent dans la religion préhellénique qui célébrait aussi des tauromachies sacrées.
Des peintures murales représentant des hommes à tête de taureau ont été retrouvées, et cette créature aurait pu faire partie de la démonologie crétoise.
L'histoire du minotaure serait alors une version « tardive et maladroite » de mythes beaucoup plus anciens et de « songes effrayants ».
L'image du minotaure est presque indissociable de celle du labyrinthe, toujours selon l'interprétation de Borges, parce que l'idée d'une maison bâtie pour que les gens s'y perdent est aussi étrange que celle d'un homme à tête de taureau, et qu'il est convenable qu'au centre d'une maison monstrueuse soit un habitant monstrueux.
Ainsi, pour Vincent Message, « l’architecture hors-norme du labyrinthe répond à la nature hybride du Minotaure, leurs monstruosités se correspondent ».
La lutte entre Thésée et le Minotaure a souvent été représentée dans l'art grec.
Un didrachme cnossien présente sur une face le labyrinthe, sur l'autre le minotaure entouré d'un demi-cercle avec de petites billes figurant probablement des étoiles, sans doute en relation avec l'autre nom du minotaure, Asterion, qui signifie « étoile ».
Les ruines du palais minoen de Cnossos, avec leur nombre très élevé de chambres, d'escaliers et de couloirs, a amené certains archéologues à croire que le palais lui-même était à l'origine du mythe du labyrinthe ; d'autres localisations ont aussi été proposées comme à Gortyne, à Skotinou, à Agia Irini.
Certains mythologues modernes voient le Minotaure comme une personnification solaire et une adaptation Minoenne du Baal-Moloch des Phéniciens.
Le meurtre du Minotaure par Thésée, dans ce cas, indique la rupture des relations athéniennes avec la Crète minoenne.
Selon A.B. Cook, Minos et le Minotaure ne sont que deux formes différentes du même personnage représentant le dieu-soleil des crétois, qui a dessiné le soleil comme un taureau.
Lui et J.G. Frazer expliquent l'union de Pasiphaé avec le taureau comme une cérémonie sacrée lors de laquelle la reine de Cnossos était mariée à un dieu de forme taurine, tout comme l'épouse du tyran d'Athènes était mariée à Dionysos.
E. Pottier, qui ne conteste pas la personnalité historique de Minos, compte tenu de l'histoire de Phalaris, estime qu'il est probable qu'en Crète (où un culte du taureau pourrait avoir existé à côté de celui de la labrys) les victimes étaient tourmentées en étant enfermées dans le ventre d'un taureau d'airain.
L'histoire de Talos, l'homme crétois de bronze, qui se chauffait à vif et serrait les étrangers dans ses bras dès qu'ils débarquaient sur l'île, est probablement de la même origine.
Une explication historique du mythe se réfère au temps où la Crète était la principale puissance politique et culturelle dans la mer Égée.
Comme la naissance d'Athènes (et probablement d'autres villes grecques du continent) était un hommage à la Crète, on peut supposer que de tels hommages incluaient de jeunes hommes et femmes pour un sacrifice.
Cette cérémonie pourrait avoir été réalisée par un prêtre déguisé avec une tête de taureau ou un masque, ce qui explique l'imagerie du Minotaure.
Il se peut également que ce prêtre ait été le fils de Minos.
Une autre explication est que la Crète dominait dans l'Antiquité la Méditerranée, que la Grèce de cette époque qui n'était composée que d'Athènes était en position de soumission et qu'elle versait chaque année (ou tous les 9 ans, selon les versions) un tribut à la Crète sous la forme de 7 jeunes gens et 7 jeunes filles.
Une fois que la Grèce continentale fut libre de la domination de la Crète, le mythe du Minotaure a pu être retravaillé sans la conscience religieuse des cités hellènes de croyances minoenne.
Évocations artistiques Peinture du minotaure par George F. Watt, qui a inspiré la nouvelle « La demeure d'Astérion » de Jorge Luis Borges. Thésée et le Minotaure, détail d'un stamnos attique à figures rouges par le Peintre d'Altamura, v. 460 av. J.-C., Staatliche Antikensammlungen de Munich.La bataille entre Thésée et le Minotaure est un sujet fréquent dans l'art antique, particulièrement sur la céramique, mais aussi dans la statuaire avec le groupe de Thésée combattant le Minotaure dû à Myron.
Les arts plastiques occidentaux s'en sont aussi fait l'écho, avec Rodin, Minotaure, Picasso, Thésée tuant le Minotaure, ou René Iché, Minotaure, ou Thésée tuant le Minotaure.
LittératureLa littérature s'est aussi emparée du sujet, faisant de la recherche du Minotaure au fond du labyrinthe une épreuve initiatique visant à détruire le monstre bestial qui se cache en chacun de nous.
Dante, dans son Enfer, imagina le minotaure avec un corps de taureau et une tête d'homme, probablement parce qu'il connaissait les anciens textes, mais pas leurs représentations artistiques.
Borges, dans sa nouvelle la Demeure d'Astérion (dans l'Aleph), revisite le mythe en faisant du Minotaure un être innocent quoique apparaissant quelque peu monstrueux et se laissant tuer par un Thésée relégué au rang de personnage secondaire, décrit dans le monologue du Minotaure comme un sauveur venu le délivrer.
Friedrich Dürrenmatt a lui aussi réécrit le mythe du Minotaure, en en faisant une parodie, dans la Ballade du Minotaure.
Dürrenmatt a inversé les caractères des personnages, faisant de Thésée un assassin et décrivant le Minotaure comme un être doux, solitaire et sensible.
Alors que le Minotaure n'a longtemps été qu'un faire-valoir du héros, il se trouve ainsi revalorisé à partir du XXe siècle.